jeudi 22 novembre 2012

Retrouvailles de A à Z


A

Il est là. Le crâne rasé. Face à ma fenêtre. Il attend dans le parc. Sans gêne. Il pense reprendre ce passé resté en plan, quatre ans avant.

B
J'étais bardée de barbelés. Il m'a rebranchée. Bêtement, j'ai balbutié. Dans ses bras, le baiser a brinquebalé. Et, rebelote les blessures.



C

Ce que Casanova a concocté : créer conditions correctes. Cacher conquêtes concomitantes. Cracher sur sa compagne actuelle et me reconquérir.

D

Il déboule derechef dans mon désert. Il dit que son destin m'a été dédié. Il désire redevenir mon double, j'adore ce dandy, je dis d'accord.

E

Que cette scène se répète, et c'est l'Eden. Bercements, éther, reflets d'encres légères, pensée, pèse-nerfs, et ce rêve de rester ensembles.

F

Finalement, j'ai enfermé l'enfer de ta fuite en mes plus profondes fibres. Tu refais surface entre les récifs. Et je vais refuser fermement.



G

Ce gars me regarde. Je suis gênée. Pas mon genre. Il me dévisage. Il a grossi mais c'est sa dégaine. Je gamberge. Je me gare. Je l'ai giflé.


H

Il me hèle dans le hall de l'hôtel. C'était mon homme. Il a hanté huit de mes années, en me harcelant. Je hurle qu'aujourd'hui, je le hais.


I

Il me défie de reprendre cette idylle. Je me défile. Je ris. Cette idée fictive de lien éternel, dis-je, ne se lit qu'en des piètres livres.


J

Subjuguée, je le suis. Il enjolive notre jeunesse. Il la rejoue. Le grand jeu. Il me le jure... Et, parjure, il prend ses jambes à son cou.

K

Il est karatéka et me met KO quand je lui dis ok pour le remake. Avec son mikado, il me refait le coup de l'amour en kit. Le cas de le dire.


L

Alléluia ! Sur son cellulaire, il a libellé un reblabla avec violons et violoncelles, soleil et saltarelle. J'y allai, et, ce fut l'hallali.


M

Remember. Il a été mon premier maraud, et son amour, une flamme immortelle. Et, maintenant, il mimait manifestement le moment des serments !

N

Non, que nenni, n'imaginez pas de nouvelles noces. Ne niez pas, ne venez pas, vous me peinez, mes nerfs noués. Aller à Ninive pour se noyer.

O

Ma mort est proche et je t'exhorte. Recommençons. Amore. Amore. Amore. Revenons vers l'orée des songes, croquons encore la pomme, follement.



P

Repeupler les pages de nos plaisirs. Nous permettre le pire. Espérer la paix des esprits. Respirer en ce repos, reprenant, des années après.



Q

Quinquagénaire, il se requinque en repiquant à d'antiques conquêtes. Il débarque, et quasi le temps d'une quête, le satané coquin rembarque.

R

Tourner en rond et ronronner, retours répétés, revenir en arrière, réviser, bref recommencer, redire, faire rejaillir l'amour, et, repartir.



S

Une histoire classée sans suite. Il ressuscite le dossier. Il assaisonne la sauce et la sert. Et moi sans souci, je le laisse m'assassiner.


T

Tapiner, toilettée, talons, voilette violette, trottiner sur les trottoirs, et, me heurter à toi. Ô retrouvailles ! La tête que t'as fait !


U

Il est revenu. Plus vu, de belle lurette. Cent et cent lunes. Le rêve me surprend plus qu'une nuée de huppes. Très peu prudente, je rechute.



V

Voyageur volage, il revient. Rêve vivace encore. Souvenirs de nos vagabondages vespéraux. Je dis, ah ! je veux m'évader vraiment avec vous.


W

Je le revois dans le train de Waterloo devant les WC du wagon de première. Il semblait un cow-boy sorti d'un western. Soudain twist again.



X

Mon ex revient de son extravagant exil et exige de me revoir. Excessif, vexant, quand je l'expédie, il dit que je ne suis plus du tout sexy.

Y

Il recycle des stéréotypes en smiley : synesthésie, synchronie, synergie, sympathie... Il essaye, et, me voilà tombée de Charybde en Scylla.


Z

Mon jazzman recompose mezza voce le puzzle. Blizzard après mes lazzi. Zinzin, il revient de Zanzibar pour un pizzicato. Je reste de bronze.



Lirina Bloom



140 caractères pile-poil associés à la contrainte oulipienne "coton majoritaire" qui oblige à utiliser en majorité et en allitération chacune des lettres de l'alphabet successivement.

Variantes contraintes de l'histoire suivante écrite, d'abord, librement au fil de l'eau, mais en 140 :

Un appel ou deux par an. Nous disions vouloir garder des parcelles de notre jeunesse. Et il est arrivé, en chair et en os et le désir avec.
Il est là. Trente ans sont passés. Les sillons sur ses joues. Le regard intact, et la voix. La nuit à parler. Et puis, il n'est pas reparti.
Il a apporté des fleurs et des bonbons, réglisse et tulipes blanches, comme à notre premier rendez-vous. Nous oublions le temps et la pluie.






2 commentaires:

  1. Bravo Lirina!

    L'idée de cette série est super et sa réalisation extra de z à a et inversement ou lus en salade, au hasard.

    J'ai quand même mes chouchous : fghkqz...

    ¦-)
    Zéo Zigzags


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  2. - bravo pour le je,le jeu littéraire
    - pour le jeu des syllabes : retrouvailles sans fuir,...& puis, s'en fuir
    - esperluette:un caractère et des lettres!

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